Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
SHOAH EN MEMOIRE
Archives
7 mai 2010

Histoire et Mémoires de la seconde guerre mondiale et de la Shoah

            Au lendemain de la seconde guerre mondiale sont révélées des atrocités encore impensables dans un 20ème siècle fragile.  Les camps de concentration sont ouverts et le monde découvre l'horreur nazie. Des souvenirs, des mémoires, et des points de vue différents fleurissent, au bord des ruines, sur le chemin du renouveau. La pluralité et la diversité des mémoires permettent des interprétations parfois contradictoires...

            

            Citons, tout d'abord la mémoire gaulliste, une mémoire qui s'est instaurée autour du général de Gaulle dès juin 44. Cette mémoire officielle souligne l'ampleur de la Résistance française pendant l'Occupation. En témoigne, par exemple, le transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon le 19 décembre 1964. Lors de la cérémonie, André Malraux, ministre de Culture à l'époque, affirma, s'adressant aux jeunes Français : « Aujourd'hui, jeunesse, puisses-tu penser à cet homme comme tu aurais approché tes mains de sa pauvre face du dernier jour, de ses lèvres qui n'avaient pas parlé : ce jour là, elle était le visage de la France » Ici est fait l'éloge du résistant modèle. Cependant la collaboration et la participation de l'Etat français au génocide sont occultées dans cette mémoire officielle.

                                                    25275_1397892747847_1248102378_31177234_3409939_n_1_                  


            Mur des victimes à Auschwitz Birkenau : La mémoire survit à travers, les visages et les noms des victimes...

            Après la guerre, on observe aussi l'émergence d'une mémoire communiste. Malgré une situation ambiguë dans les années 1930 et surtout au début de la guerre (le  parti communiste français était alors rattaché à Moscou ; l’URSS et l'Allemagne se lient en septembre 1939  par le pacte germano-soviétique), la situation est clarifiée après que Hitler attaqua l'URSS (opération Barbarossa en 1941). L'armée rouge fait face à la Wehrmacht sur le front de l'Est et les communistes français entrent dans la Résistance. Le parti communiste français est vite surnommé « le parti des 75 000 fusillés ». Cette mémoire jouit, à l'instar de la mémoire gaulliste, de ses propres symboles : le martyr de Guy Môquet par exemple.

            Une troisième mémoire s'impose tardivement : la mémoire juive. En effet, au départ, le traumatisme enferme les Juifs dans le silence. Puis petit à petit les survivants expriment leur besoin de témoigner. Claude Lanzmann réalise « Shoah » (en hébreu « désastre ou catastrophe»), un film sorti en 1985 qui rassemble des témoignages de Juifs quant à leur expérience dans les camps de la mort. Claude Lanzmann parvient même à interroger un tortionnaire. Les témoignages (des victimes et des bourreaux) convergent vers un même point : la Shoah  est une réalité incontestable.  Le procès Eichmann (responsable nazi de la logistique de la « solution finale ») en 1961 à Jérusalem est un autre exemple de cette volonté de mémoire et de justice qui naît dans l'esprit de la communauté internationale.

                                                            26226_1381957750661_1283481715_31095098_3785754_n_1_


            Madame Ginette Kolinka, survivante de Birkenau,  face à une photographie exposée dans un baraquement d'Auschwitz I : la mémoire subsiste à travers les témoignages...

            Certaines interprétations de la Shoah donnent naissance à des interprétations dangereuses.  Les négationnistes, qui se font d’abord appelés « révisionnistes » ont cherché à modifier la vision que l'on a de la Shoah. Ces pseudo-historiens nient l'existence des chambres à gaz dans les camps de la mort « comme moyen de la solution finale ». Ils remettent ainsi en cause la véracité des témoignages. Les  négationnistes furent d'abord des professeurs (d'histoire et de lettres) qui, dans des universités comme celles de Lyon ou Nantes, enseignèrent à leurs élèves leurs théories. [En réalité, ces nouvelles thèses ne résultent que d'une idéologie néo-antisémite qui s'enracine obstinément dans le très vieux mythe du complot juif.]  Il faut empêcher ces interprétations erronées de se propager et rechercher la vérité, si difficile soit-elle à appréhender, grâce à un véritable travail d’historien : recueil de témoignages, croisés avec les sources encore disponibles, enquêtes  etc. Ainsi le devoir d’histoire s’impose pour contrer le négationnisme.

            Les discours de Jacques Chirac et Lionel Jospin, lors de la commémoration de la rafle du Vel'd'Hiv le 16 Juillet 1995, marquent une rupture dans la position de la France face à sa mémoire de la Shoah. Pour bien comprendre, rappelons-nous la mémoire officielle imposée par le Général de Gaulle (éloge d'une France résistante ; oubli de la collaboration ; amnistie de collaborateurs...) Ces mesures témoignent d'une France qui veut tourner la page et revivre. Ainsi, lorsque Jacques Chirac, à l'occasion de la commémoration de la rafle du Vel'd'Hiv reconnaît la participation de l'Etat français dans le génocide juif, la position de la France face à sa responsabilité change radicalement. Une volonté de justice s'affirme : le président français promet d'indemniser les Juifs. Cette rupture marque donc une nouvelle période de mémoire et de justice.

                                                             MemorialDeLaShoah


Monument au souvenir des victimes juives au Mémorial de la Shoah à Paris. L'inscription en hébreu sur le mur est extraite de la Bible ; elle signifie : « Regardez et voyez s'il est douleur pareille à ma douleur. Jeunes et vieux, nos fils et nos filles fauchés par le glaive » La mémoire persiste à travers nos esprits ouverts et tolérants...

            Aujourd'hui, visitons le mémorial de la Shoah à Paris

            Aujourd'hui, renseignons-nous ! Voyons des films comme Nuit et brouillard (d’Alain Resnais), Shoah (de Lanzmann ), La rafle ( de Roselyne Bosch )... autant de films qui cherchent à montrer de façon différente

            Aujourd'hui, lisons les témoignages. Lisons Si c'est un homme ( de Primo Levi ), Dites-le à vos enfants, Histoire de la Shoah en Europe ( de S. Bruchfeld et Paul A. Lévine )

            Aujourd'hui, écoutons les témoins (merci à André Gaillard, Charles et Arlette Testyler et Ginette Kolinka)

            Aujourd'hui, comprenons les Israéliens qui s'immobilisent et observent deux minutes de silence au souvenir des victimes de la Shoah tous les 12 Avril.

            Aujourd'hui, refusons le silence, refusons le négationnisme, réclamons la vérité.

            

            Et demain, racontons à nos enfants, transmettons-leur le flambeau du souvenir (précieusement confié par d'irremplaçables témoins) pour que la mémoire triomphe toujours sur l'ignorance, sur les falsificateurs de l'Histoire et sur l'intolérance !

            Ainsi les mémoires de la seconde guerre mondiale sont diverses et même parfois opposées. Histoire et Mémoire, souvent, ne s'accordent pas. Il est à nous, esprits curieux et désireux de savoir, de réconcilier Mnémosyne et Clio...

Henri Fruneau

Publicité
Commentaires
SHOAH EN MEMOIRE
Publicité
SHOAH EN MEMOIRE
Publicité